ELLE « Tu veux pas faire quelque chose de tes journées pour une fois ? »
MOI « J'ai toujours fait quelque chose de mes journées. »
ELLE « Autre que t'enfermer dans cette pièce Robin, tu m'as comprise. »
MOI « J'ai rien d'autre à faire. »
ELLE « Tu ne peux pas aller faire les boutiques avec tes amies ? »
MOI « Pas d'argent. »
ELLE « Allez vous baigner alors ! »
MOI « Trop froid. »
ELLE « Bon, et bien reste ici à faire ta tête de mule si tu y tiens ! »
MOI « Et ferme la porte en sortant ! »
Depuis la fin de mes études, c'était la même chose. Occuper mes journées étaient devenu un vrai calvaire. Je connaissais Londres comme ma poche maintenant, le côté moldu comme le côté sorcier. Mon diplôme en poche, je m'étais mise en tête de chercher une formation. C'était sans compter sur le lubie de ma mère qui avait décidé de nous faire partir plusieurs mois à l'étranger. Le monde m'attendrait encore. Une fois revenues, c'est quelque chose nommé flemmardise qui me pris. Je cherchais sans chercher de quoi m'occuper pour les quarante à cinquante prochaines années, mais tout me plaisait en même temps que tout me rebutait.
L'enseignement ? Oui, ça pourrait être sympa, mais je finirai par tuer l'un de mes élèves une fois ma patience à terme (et le terme chez moi n'est jamais loin). Le médical peut-être ? Sauver des vies oui, ça m'intéresserait mais je doute également d'être assez douce avec les patients les plus casse-pieds. J'aurai bien envie d'en achever certains plutôt que de les sauver. En fait, le métier qui mirait le mieux serait dominatrice du monde, mais je n'ai pas encore trouvé de formation pour ce faire. Je ne changerai pas grand chose, c'est vrai, juste un ou deux trucs histoire de, et tout irait bien pour le reste de la planète. En attendant, je me contente de lire les plus grandes histoires de justice de ces trois derniers siècles. C'est vrai que ça m'intéresse bien la justice. Pouvoir en sauver quelques uns, en condamner d'autres (qui a osé vous dire que je n'étais pas sadique ?). Y'a pas a dire. Dominatrice du monde libre ou bien juriste du magenmagot.
Refermant mon ouvrage, je l'ai laissé choir sur mes genoux. Sortie de Poudlard voila deux ans, avec les honneurs en plus, et pas capable de trouver de quoi s'occuper. Le dos contre un accoudoir du fauteuil, les jambes passées par dessus le second, j'ai croisé mes bras sous ma tête et je me suis laissée aller à la réflexion. Ma mère travaillait à l'étage inférieur. Elle tenait une librairie pour moldus, un peu fréquentée, mais pas tant que ça. Elle disait toujours qu'elle ne refuserait pas un ou deux clients en plus dans la journée. Elle est moldue, et semble très bien accepter le fait que je sois différente. Mon père, je ne le connais pas. Encore un salaud qui a charmé une demoiselle par de belles paroles et qui l'a engrossée avant de partir au loin, trouver une autre gazelle ou bien entre quatre murs dans une cellule. Les autres me font rire quand ils parlent de présence paternelle et ainsi de suite. Je m'en suis très bien passée et je ne suis pas féministe pour autant ... ou très peu.
De toutes manières, rien ne servait de ruminer comme ça, sur ce genre de choses. J'ai posé mon livre sur la table basse, et je me suis relevée. Ma mère avait raison, fallait que je fasse autre chose de mes journées que lire. Une main blanche passée sur le visage, une autre dans mes cheveux roux. A nous voir avec ma mère, on aurait jamais dit que nous étions de la même famille. Elle était grande, élancée. Une jolie brune aux yeux de verre, un bleu transparent. Elle n'avait pas de tâches de rousseurs, un petit nez carré qui complétait avec merveille les formes de son visage. Regardez moi. J'ai les cheveux roux, d'une épaisseur à ne plus savoir qu'en faire. Mes yeux chocolats sont d'une banalité à en faire bailler n'importe qui. Des fossettes, un nez retroussé, de maudites taches de rousseur. Bref, j'ai le visage typique d'une Irlandaise mélangé à une écossaise qui n'avait rien à faire de sa vie à part venir s'exiler dans le vieux Londres. Ce n'était pas que je ne me trouvais pas jolie, non, disons que je me trouvais banale, et du coup, pas forcément agréable à regarder. Enfin bref, nous n'allons pas nous éterniser la dessus non plus.
J'ai attrapé un élastique qui traînait près de mon livre et j'ai attaché ma tignasse à la va-vite avant de mettre un pied hors de la bibliothèque de l'appartement.
MOI « Qu'est ce que tu fais encore là toi ... tu peux pas sortir comme tous les autres ? Tu t'es fais exclure de la bande de matous du quartier ou quoi ? Allez Lucifer, ouste ! Va voir ailleurs si j'y suis ! »
Lucifer, c'est mon chat. Un pachyderme de cinq ans, roux aussi, pour bien cordonner le truc et qui, à défaut de savoir lire, passe ses journées dans le couloir, à dormir. Ma mère me l'a offert pour l'obtention de mes Buses, elle l'avait affectueusement surnommé "Petit Mimi". C'est vrai qu'il était petit quand je l'ai eu. Le voila énorme au point que je suis sûre qu'il ne voit même plus ses pattes. Quand il est à la maison c'est vrai, mais quand on était à Poudlard, ce n'était pas l'exercice qui manquait pourtant. Je passais mes journées à lui courir après pour récupérer ma cape, mon pull ou ma cravate qu'il avait la bonne idée de me chiper en échange d'une sucrerie. J'ai tapé du pied sur le sol pour le faire se lever, mais mis à part déranger monsieur dans son sommeil, je n'ai pas réussi à grand chose. Il me miaula longuement et de mécontentement avant d'aller finir sa sieste sous le meuble. C'est vrai qu'on a pas l'impression parce qu'il est un peu con comme chat, mais je l'aime un minimum quand même. Disons qu'il n'est pas malheureux. J'ai ensuite attrapé le téléphone et composé un numéro de mémoire. Une sonnerie, deux sonneries, et je priais pour ne pas tomber sur ...
ELLE « ALLO !! ALLO !! OUII !! »
MOI « Ne criez pas Mrs Glendwood. Je vous entends très bien ! ou du moins, de l'oreille droite seulement maintenant. C'est Robin, est-ce que Jessy est là ? »
ELLE « ... »
Elle était bien mignonne la mère de Jessy, mais fallait vraiment lui apprendre à vivre avec la technologie moldue, ce qui ne serait sans doute pas une mince affaire. Jess me racontait qu'un jour, voulant me rendre visite, sa mère était passée par la cheminée sans même savoir si nous en avions une et si elle était raccordée au réseau de cheminette. Coincée plusieurs heures, je ne vous dis pas les dégâts.
ELLE « Robin ? Ca va ? Excuse ma mère, je crois qu'elle n'a pas encore bien compris comment s'en servir. »
MOI « Pas grave. Tu fais quoi d'ici cinq minutes ? »
ELLE « J'comptais aller bronzer sur une plage française. On dit que les types y sont mignon. »
MOI « Laisse tomber. Tu viens avec moi dans un château hanté en Écosse ?. »
ELLE « D'accord! on se retrouve à l'endroit habituel, dans cinq minutes, et sois pas en retard, tête de Troll ! »
MOI « J'essayerai, promis. »
Jess (ou Jessy selon mes envies, Jessica de naissance) était une de mes grandes amies. Nous nous étions rencontrées à Poudlard, l'année de notre arrivée. Même si on ne s'entend pas toujours bien, on reste assez liée et on sait qu'on peut compter l'une sur l'autre. Jessica vit à Dublin, et notre grand passe temps, c'est d'essayer de se faire peur en allant visiter les manoirs fantômes d'Écosse, même si ça ne sert plus à grand chose. Alors notre autre grand délire était aussi celui d'effrayer les moldus avides de sensations forte avec quelques petits sortilèges de base ou un rire emprunté à un film d'horreur moldu. Oui, c'est vrai, nos mère parlent de nous en tant qu'adultes, mais nous ne sommes rien de plus que des enfants dans un corps de grande personne. Je sais être sérieuse dans certains cas, d'autant plus que je suis de nature plutôt réservée et que je me montre bien différente de ce que je ne suis en réalité, mais avouez donc que rien n'est aussi agréable que de partir dans un fou rire avec une amie pour rien du tout. Un petit saut hâté dans ma chambre pour prendre ma baguette et une veste un peu plus chaude que ce que j'avais sur le dos. Bien entendu, celle que je voulais était introuvable, j'vous le donne dans le mille, c'est sous le chat que j'ai remis la main dessus.
Me restait plus qu'à descendre prévenir ma mère et partir dans une ruelle sombre pour transplaner. Ahh le transaplanage, quelle belle invention. Sans ça, nous ne savons pas ce que nous serions devenues Jess et moi. Je passe par la boutique donc, saluant ma mère d'un signe de la main. Direction la ruelle la plus proche et plop, disparue. Généralement, nous nous retrouvions dans une maison abandonnée au large de Limerick. Puis nous partions ensemble vers de lointaines contrées. Quand je suis arrivée, elle avait les bras croisés et son pied tapotait le sol. Ah, j'étais en retard visiblement. Je ne mets jamais de montre, je n'aime pas ça, et comme la ponctualité n'est pas mon fort ... bref. Un léger sourire d'excuse et tout serait pardonné.
ELLE « Comme d'habitude hein ? »
MOI « On ne change pas une équipe qui gagne n'est ce pas ? »
ELLE « Mouais, dis, j'ai oublié, tu as entendu parler de cette histoire d'université magique ? »
MOI « Une université magique ? Non pas du tout. »
ELLE « Mon père m'a dit qu'une allait ouvrir pour Septembre. On va pouvoir avoir une vraie formation et tout ! »
MOI « Tu divagues Jess, qui serait assez cinglé pour ça ? »
ELLE « Ah oui, j'oubliais mademoiselle je vis au jour le jour. Bon y va ? Faut que je sois rentrée pour dîner moi. »
C'est vrai qu'au début, je n'y ai pas cru. Nous avons passé notre après-midi à nous amuser et une fois la journée finie, tout le monde rentré chez soi, j'ai envoyé quelques hiboux, passé quelques coups de téléphone. De fil en aiguille, j'en ai tiré la conclusion qu'une université magique ouvrirait bien ses portes, ce qui enchanta ma mère. Moi pas tellement en fait, mais c'était alléchant également de savoir que quelqu'un prendrait soin de la future communauté magique active. J'avais hâte de découvrir ces nouveaux murs et également de repratiquer la magie plus en profondeur. Finalement, ce n'était peut-être pas une si mauvaise idée. Mon histoire de fille banale, avec une histoire banale et dans un monde peu banal allait pouvoir reprendre son cours normalement.